Informer les locataires pour mieux les outiller à faire face à la crise du logement


Il s’agissait de la première d’une série de rencontres prévues au Bas-Saint-Laurent, dans le cadre de la campagne de sensibilisation : Le droit des locataires, ça se défend!

La rencontre était animée par le représentant du Comité logement Bas-Saint-Laurent, Alexandre Cadieux, et Sylvain Dubé, coordonnateur d’Action-Logement de l’Est, qui couvre la Matapédia, la Matanie, la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine.

Il y aurait peut-être eu le double de personnes s’il n’y avait pas encore cette crainte liée à la COVID, avance M. Dubé, qui se dit tout de même satisfait de l’activité.

Les deux hommes se trouvent dans la salle de la cuisine collective de Matane. Sylvain Dubé tient une pochette contenant tous les dépliants d'information sur les droits des locataires.

Alexandre Cadieux et Sylvain Dubé se sont dits satisfaits de la première rencontre d’information tenue à Matane mardi.

Photo : Radio-Canada / Catherine Poisson

Les personnes présentes avaient plusieurs questions, et plusieurs commentaires sur des aspects à améliorer. On s’y attendait. C’est un peu la limite de la démarche, explique M. Cadieux.

« On est là pour faire circuler l’information sur les droits existants dans un contexte où les mécanismes légaux sont insuffisants pour protéger adéquatement les droits des locataires. Et plus largement, dans le contexte de la crise de logement. »

— Une citation de  Alexandre Cadieux, représentant du Comité logement Bas-Saint-Laurent

La situation est effectivement critique pour les locataires. À Rimouski, le taux d’inoccupation des logements est de 0,2 %. Or, il tombe à 0 % dès qu’on cherche un logement de deux chambres et plus.

Et encore, 0,2 %, c’est deux chambres sur 1000 et ce sont pas mal toutes des chambres à louer ou des petits studios, ajoute M. Cadieux.

À Matane, si le taux d’inoccupation est de 1,7 %, M. Dubé affirme qu’en fin de compte, le portrait est le même qu’à Rimouski : les appartements de deux chambres et plus, abordables, sont introuvables.

Dans les annonces, les plus petits quatre et demi sont à 1095 $ et il y en a qui sont annoncés à 1400 $ ou 1500 $, en plus des logements clandestins qui ne sont pas annoncés, et là, on n’a pas grand contrôle là-dessus, c’est l’argent qui prédomine, soupire M. Dubé.

« À même date l’année prochaine, Matane va être dans la même situation que Rimouski. On l’est déjà. »

— Une citation de  Sylvain Dubé, coordonnateur d’Action-Logement de l’Est

Il se dit d’ailleurs surpris que voir qu’à Matane, de plus en plus de gens acceptent de louer un logement clandestin, c’est-à-dire sans signer de bail, en remettant en argent le montant réclamé par le propriétaire.

Beaucoup d’autres ont accepté de signer un bail sans avoir visité physiquement le logement, ce qui leur réserve souvent de mauvaises surprises quant aux conditions réelles du logement.

Et en Gaspésie, c’est 10, 20, 30… 40 fois pire, lance M. Dubé.

Des familles mises à la rue

Il faut dire que plusieurs se résignent à accepter ce genre de conditions peu désirables pour éviter de se retrouver à la rue, ce qui arrive malheureusement trop souvent.

À Matane, au moins cinq familles ont été mises à la rue depuis janvier, indique M. Dubé. Ça, c’est ce qui est connu, précise-t-il, mais il se dit certain que plusieurs autres ont aussi été évincées pour diverses raisons, et ce en plein hiver.

Son comité souhaite d’ailleurs inciter les villes et municipalités à mettre en place un plan d’urgence pour soutenir leurs résidents qui se retrouvent dans cette situation.

Un besoin criant de logements sociaux

De nombreux facteurs expliquent comment la région s’est retrouvée dans cette situation, selon Alexandre Cadieux ; moins de logements sociaux, et de logements tout court, ont été construits dans les dernières années, le nombre de logements réservés aux séjours touristiques a bondi en flèche, notamment sur la plateforme Airbnb, les séparations et les divorces ont augmenté, ce qui fait qu’il faut maintenant plus de logements pour le même nombre de familles et la pandémie a provoqué une vague de migration des grands centres vers nos régions.

Le constat, c’est que le marché privé est incapable de livrer des logements de qualité à prix abordables aux personnes les plus pauvres, conclut-il.

« On passe notre temps à analyser tel et tel dossier, mais le fait est qu’en ce moment, avec le coût des terrains, des bâtiments et des matériaux de construction, c’est ridicule de penser que des entrepreneurs privés vont bâtir quelque chose de qualité, l’entretenir, l’afficher à un prix raisonnable et dégager une marge de profit… quand on sait qu’un chèque d’aide sociale c’est 726 $ par mois. »

— Une citation de  Alexandre Cadieux, représentant du Comité logement Bas-Saint-Laurent

À partir de là, on a deux solutions : subventionner le secteur privé ou se créer de la richesse collective en développant du logement social. Et en ce moment, le gouvernement est en train de dire clair et net qu’on en fait plus du logement social. On a beau réglementer Airbnb, empêcher ceci ou cela, ce sera juste des plasters, déplore-t-il.

Québec a annoncé en février un nouveau programme qui prévoit des investissements de 200 millions de dollars pour la construction de logements dits abordables, mais pas de logements sociaux. L’annonce a été fortement critiquée, notamment dans l’Est-du-Québec.

Des fiches d'information sur les droits des locataires sont éparpillées sur une table.

Le Comité logement Bas-Saint-Laurent a développé 14 outils d’information pour informer les locataires sur 7 enjeux principaux. Tous les outils sont disponibles en ligne.

Photo : Radio-Canada / Catherine Poisson

Devant cette impasse, les locataires ne peuvent que s’informer sur leurs droits et les faire respecter. C’est d’ailleurs l’objectif des 14 outils d’information développés par le Comité logement Bas-Saint-Laurent, tous disponibles sur leur site web, et de la tournée dans la région.

Les prochaines rencontres sont prévues au Témiscouata le 11 avril, à Trois-Pistoles le 24 avril, et à Rivière-du-Loup en mai. Des dates seront également ajoutées par la suite au Kamouraska et à Rimouski.



Reference-ici.radio-canada.ca

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