Des stéréotypes sur les Chinois utilisés pour apprendre le français


Les Québécois sont un peuple accueillant et ouvert à la diversité. Il est important que les contenus éducatifs des cours de français destinés aux immigrants représentent adéquatement nos valeurs, indique le ministre de l’Immigration, Jean Boulet.

Ce dernier, interpellé par Radio-Canada, avoue avoir été étonné par la teneur de plusieurs documents que nous avons obtenus, qui ont servi jusqu’à tout récemment à des cours de francisation.

Au Centre Louis-Jolliet, à Québec, qui offre des formations destinées aux adultes, une fiche intitulée La description physique propose des dessins et quelques phrases pour illustrer l’apparence.

Il a des petits yeux. À côté de ces mots, on retrouve un personnage vraisemblablement d’origine chinoise, au nez aplati, avec un chapeau pointu et un habit traditionnel, qui a, dans une main, un petit bol.

On aperçoit également d’autres personnages – des femmes, des hommes, des jeunes ou des personnes âgées – avec différentes phrases : Il est jeune, Elle est belle, Il est normal.

Il s’agit d’une initiative d’une enseignante ou d’un enseignant, explique Vanessa Déziel, porte-parole du Centre de services scolaire de la Capitale, dans une déclaration écrite.

Ce document, soutient-elle, n’a pas été produit par le Centre Louis-Jolliet, ni [par] le Centre de services scolaire. Un suivi, promet-elle, sera fait auprès des enseignants qui ont le libre choix de leur matériel pédagogique.

« Nous sommes d’avis que la caricature peut porter à interprétation. Nous nous assurerons de sensibiliser nos enseignants au Centre Louis-Jolliet afin que leurs outils soient neutres. »

— Une citation de  Vanessa Déziel, porte-parole du Centre de services scolaire de la Capitale

Un malaise, admet l’UQTR

C’est du racisme et c’est assez bouleversant, s’insurge Winston Chan, entrepreneur et membre du conseil d’administration de la Coalition nationale des Canadiens contre le racisme anti-asiatique.

Ce dernier ne mâche pas ses mots, non plus, contre un autre document distribué par l’École internationale de français de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).

Extrait d'une conversation.Agrandir l’image (Nouvelle fenêtre)

Extrait de la fiche de lecture, qui a été utilisée à l’UQTR, intitulée « La cuisine internationale ».

Photo :  Capture d’écran / Fiche de lecture de l’UQTR

Dans une fiche de lecture, intitulée La cuisine internationale, on découvre un dialogue entre deux personnages au sujet des spécialités culinaires.

La cuisine chinoise, elle te plaît?, demande l’un d’eux. Tu veux rire? Je ne mange pas de chat, lui répond-on.

D’autres types de nourriture sont critiqués dans ce document que nous avons pu consulter sur Internet, mais qui a été retiré par l’UQTR.

La choucroute allemande […] c’est dégueulasse! Et puis, ça pue. Les Français […] mangent des escargots et des cuisses de grenouille! Ça vit dans les marais, ces bébites-là! La cuisine mexicaine ou indienne? C’est aussi très épicé, assure l’un des personnages.

Ce texte narratif servait d’exercice dans le cadre d’un cours destiné à des étudiants en immersion en français ou à des immigrants, confirme le porte-parole de l’UQTR, Jean-François Hinse.

Il s’agit d’un extrait d’une discussion entre deux personnages fictifs, où l’un d’eux présente de grandes ignorances à propos des habitudes culinaires dans différentes cultures, soutient-il, en évoquant des réactions prises hors contexte.

« Devant les commentaires reçus, la chargée de cours a retiré ce texte du site web où il était placé à la disposition des étudiants. Nous nous désolons du malaise que cette publication a pu causer. »

— Une citation de  Jean-François Hinse, porte-parole de l’UQTR

Évidemment, une réplique d’un personnage caricatural dans un texte narratif n’est pas le reflet des valeurs de la chargée de cours de l’École internationale de français de l’UQTR ni de l’Université, précise-t-il.

L’enseignante, à l’origine de cette fiche de lecture datée de 2008, n’a pas répondu aux questions de Radio-Canada.

Fo Niemi devant une voiture.

Selon Fo Niemi, directeur du Centre de recherche-action sur les relations raciales, ces images sont « offensantes ».

Photo : Radio-Canada

Des publications dépassées

Aux yeux de Winston Chan, ces types de publications sont passées date. Je ne vois pas la pertinence, pour apprendre le français, de dire que les Chinois mangent du chat, estime-t-il.

« Ce sont les mêmes stéréotypes que j’ai connus lorsque j’étais plus jeune, et qu’on faisait des comptines sur les Chinois. Je pensais qu’on ne faisait plus ça. »

— Une citation de  Winston Chan, membre de la Coalition nationale des Canadiens contre le racisme anti-asiatique

L’intégration des immigrants à la société québécoise passe d’abord et avant tout par l’apprentissage du français. Je suis sensible aux défis que cela peut représenter, reprend le ministre Jean Boulet.

Alors que ces contenus ont désormais été retirés, l’affaire ne doit pas s’arrêter là, affirme pour sa part Fo Niemi, le directeur du Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR).

« Il ne faut pas juste retirer ces images offensantes du matériel scolaire. Il faut faire de la formation aux enseignants et comprendre comment on a pu en arriver là. »

— Une citation de  Fo Niemi, directeur du CRARR

Il faut éduquer les gens sur la discrimination, le civisme et les stéréotypes, insiste-t-il. Il ne faut pas seulement fermer la porte sur une controverse. C’est un défi pour le gouvernement.



Reference-ici.radio-canada.ca

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