Avec les yeux , de Fishbach, un 2e opus doublement trempé dans les années 1980



Sélectionnée aux Victoires de la musique en 2018 avec son premier album À ta merci, Flora Fischbach, alias Fishbach, aura attendu quatre ans pour pondre la suite. Entre-temps, il y a eu bien sûr la pandémie, mais également un premier rôle à l’écran dans la série Vernon Subutex, aux côtés de Romain Duris.

Dans les dernières années, la jeune femme de 30 ans a quitté Paris pour retrouver ses Ardennes natales; un répit nécessaire pour celle qui en avait assez du vacarme urbain.

J’ai quitté Paris parce que c’est bruyant; je n’arrivais pas à composer et à réfléchir dans tout ce bruit. Le paysage sonore est assez violent à Paris. Retourner dans les Ardennes, c’était revoir l’horizon et écouter le bruit du vent dans les feuilles, explique-t-elle.

Ce changement de décor a favorisé une introspection, qui habite plusieurs chansons de l’album, et un processus créatif plus posé. J’ai créé [l’album] très intuitivement […] J’ouvrais mon ordinateur – parce que je compose sur ordinateur – quand j’en avais le besoin ou l’envie. C’était assez instinctif.

La guitare, un instrument sexy et féminin

Sur les onze nouveaux titres de l’album, Fishbach a également tenté de pousser sa voix à l’extrême, ne s’interdisant rien pour transmettre ses émotions. Sur certains morceaux comme La foudre, sa voix descend parfois si bas qu’on a l’impression que ce pourrait être un homme qui chante, ajoutant à la sensualité androgyne qui a fait la marque de Fishbach.

J’ai essayé avec la voix d’explorer ça et d’exagérer ça encore plus. Il peut y avoir de la fougue, de la mélancolie, de la tendresse. C’est vocalement que j’ai appuyé les choses, ces sentiments qu’on traverse tous, résume-t-elle.

Cette démesure, on la retrouve aussi au niveau des guitares, avec des solos tirés d’une époque révolue, comme celui de la pièce Nocturne, qui semble avoir été créé par un groupe de hair metal aux vidéoclips sentimentalistes. La guitare est un instrument fétiche de la musicienne qu’elle décrit comme étant sexy et féminin.

Je trouve que c’est le truc le plus sexy qui soit […] Et surtout, ça [sonne parfois] comme une chanteuse qui ferait une envolée lyrique, explique-t-elle.

Toutefois, la plupart des guitares que l’on peut entendre sur Avec les yeux ne sont pas jouées par Fishbach. Bien qu’elle ait composé les partitions, elle explique qu’elle joue très mal de la guitare et qu’elle a préféré confier l’interprétation à des collègues musiciens.

Un album inspiré par ses rêves

Fishbach explique que plusieurs des airs et des textes qui se sont retrouvés sur l’album sont des rescapés de ses rêves au petit matin ou en pleine nuit, alors qu’ils étaient encore frais. Une méthode de travail qui donne un côté surréaliste à ses paroles.

J’ai deux vies. J’ai la vie du jour, la réalité, et j’ai aussi la vie de la nuit, explique-t-elle. Je prends beaucoup de notes et il se passe des choses; c’est l’aventure, c’est vertigineux, spatial, un peu ésotérique. Donc je m’en sers comme des outils.

Au niveau musical, les chansons très années 1980, comme Masque d’Or, Tu es envie, Démodé, laissent aussi de la place à quelques ballades plus mélancoliques, comme Quitter la ville ou Arabesques.

Il en résulte une mosaïque musicale ambitieuse, sur laquelle Fishbach n’hésite pas à répondre à ses envies de grandeur; un album conçu dans la liberté totale, selon la principale intéressée.

Ce texte a été écrit à partir d’une entrevue réalisée par Eugénie Lépine-Blondeau, chroniqueuse culturelle à l’émission Tout un matin. Les propos ont pu être édités à des fins de clarté et de concision.



Reference-ici.radio-canada.ca

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