Analyse | Le brouillard du mois d’avril


Parce que le résultat de ce match entre les Jets et le Canadien, 4-2 pour Winnipeg soit dit en passant, n’a évidemment aucune valeur. Le processus, terme à nouveau à la mode depuis l’arrivée de Martin St-Louis, en a bien davantage. Tout le monde s’accorde là-dessus.

C’est donc dire que la belle tenue de Samuel Montembeault, de ses arrêts spectaculaires parmi les 31 réalisés, n’ont pas retenu beaucoup l’attention. En temps normal ç’aurait été l’histoire du match, mais il n’y avait que peu de temps à accorder au gardien québécois.

D’abord parce que le retour imminent de Carey Price rappelle à un peu tout le monde à quel point le Bécancourois semble avoir déjà un pied et le gros orteil de l’autre dans la porte, ensuite parce que les effusions sentimentales n’ont pas été nombreuses à son égard cette année.

À savoir pourquoi Montembeault a réchauffé le banc lors de 11 des 12 derniers matchs de l’équipe avant la blessure à Jake Allen, Martin St-Louis a simplement spécifié qu’Allen nous donnait de meilleures chances de gagner. Limpide.

« [Jake] avait de l’énergie, les matchs étaient espacés. Avant que Jake arrive, Sam nous a donné du bon hockey. Et ce soir, Sam nous a encore donné du bon hockey. Je ne suis pas surpris »

— Une citation de  Martin St-Louis à propos de ses gardiens

Il demeure que du 17 mars, jour du retour dans la formation d’Allen, jusqu’au 9 avril, celui de son départ, aucun gardien de la ligue n’a obtenu plus de départs (11) que le portier du Nouveau-Brunswick. Aucun gardien n’a affronté autant de tirs (416). Tout ça alors que le CH, rappelons-le au cas où, lutte uniquement pour l’honneur et qu’Allen revenait tout juste d’une blessure sérieuse.

Montembeault, lui, se bat pour sa survie dans la LNH. Il affirme avoir travaillé fort pour [s’]améliorer, il espère que les dirigeants [des autres équipes, NDLR] l’ont vu, même s’il préférerait rester à Montréal.

Ce serait ma première option, a-t-il avoué.

Mais il n’a pas été question de Montembeault, disions-nous. Ou si peu. Et ça peut se comprendre.

La progression du Québécois de 25 ans incite toutefois à se poser quelques questions. Price verra de l’action sous peu. On peut se demander si ce seront ses derniers matchs dans la Ligue nationale, si son corps abdiquera. On peut aussi se demander, advenant qu’il retrouve la forme et la pêche, si alors ce seront ses derniers matchs dans l’uniforme du Canadien.

Partira, partira pas : un autre des grands mystères de cette fascinante saison morte qui attend Kent Hughes et son équipe.

Si Price part, alors Montembeault prend soudainement de la valeur pour potentiellement seconder Jake Allen. Si Price veut rester, le CH va-t-il aussi garder Allen ou plutôt monnayer ses services. Et si Allen quitte Montréal, Hughes et St-Louis croient-ils suffisamment en Montembeault pour lui offrir le boulot d’auxiliaire et les quelque 30 matchs qui l’accompagnent?

Beaucoup de conditionnel. Beaucoup de destins qui dépendent de Price, de son genou, de ses désirs secrets.

L’un dans l’autre, Samuel Montembeault a progressé cette saison. Les statistiques classiques lui font une vilaine jambe; celles un peu plus élaborées sont plus clémentes.

Par exemple : Montembeault vient au 39e rang sur les 68 gardiens qui ont joué au moins 500 minutes cette année pour ce qui est du taux d’efficacité à cinq contre cinq, soit ,915. La médiane, c’est lui.

Il vient au 5e rang pour le nombre de chances de marquer de grande qualité qu’il a dû affronter par match (9,45). On le bombarde et ces tirs sont dangereux. Toujours selon le site spécialisé Natural Stat Trick, il résiste adéquatement à ces menaces, ni mieux, ni moins en fait bien que le gardien moyen.

Mais de ça il n’a pas été question. Ou si peu.

La discussion a plutôt dévié sur la mentalité de Martin St-Louis, sur ses spécificités d’entraîneur que tout le monde découvre, joueurs comme journalistes, étant donné son inexpérience à ce niveau. Sur ce qu’il demande à ses ouailles et tout particulièrement à Josh Anderson et Brendan Gallagher, deux ailiers dont le style de jeu, simple, clair, est parfois perçu comme unidimensionnel.

Un joueur du Canadien de Montréal célèbre après avoir marqué un but.

Josh Anderson

Photo : Getty Images / Minas Panagiotakis

Deux joueurs sans peur qui tirent et se posent des questions par la suite, qui foncent au filet, qui tentent de prendre le dessus physiquement sur leurs adversaires, quoique par des moyens différents.

On se fait dire la même chose depuis nos débuts au hockey mineur. Toujours la même chose. Nous sommes deux joueurs intelligents, on voit bien que le jeu évolue. C’est donc une question de nous rendre les choses un peu plus faciles, a expliqué Gallagher.

« Dès que Martin est arrivé, il voulait qu’on fasse attention aux détails. Ajuster sa vitesse par moments. On n’a pas toujours besoin d’aller trop vite. Il veut qu’on pense plus sur la glace. »

— Une citation de  Josh Anderson

En gros, réfléchir, gérer son énergie, ne pas la dépenser vainement, utiliser ses forces quand il le faut et donc, identifier le moment approprié.

Soyez rassurés, ce n’est pas comme si on devait changer notre identité. On doit continuer à faire ce qui nous a amené dans la LNH, a spécifié Gallagher.

C’est important si tu veux rester longtemps dans la ligue, tu dois évoluer, tout en gardant tes forces. Tous les joueurs ont des lacunes. Comme organisation, tu dois les aider à y travailler. Plus ils le font, plus ils seront productifs, a expliqué St-Louis.

Évoluer, un peu comme la fait Montembeault finalement.

C’est de ça dont il a été question. Et franchement, c’était intéressant, mais nous aurons l’occasion d’y revenir. Il reste encore un peu de brume à dissiper au mois d’avril.



Reference-ici.radio-canada.ca

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