Près d’un million de résidents en Colombie-Britannique sont sans médecin de famille


Résidente du Grand Victoria et mère de deux enfants qui ont un trouble auto-inflammatoire rare, Camille Currie explique souffrir de saignements et de troubles qui rendraient les soins postopératoires difficiles lorsqu’elle fera remplacer la batterie de son stimulateur cardiaque. Si elle a du mal à guérir, elle craint de devoir faire la queue dans un centre de soins d’urgences et primaires.

La famille de Camille Currie fait partie d’environ un million de Britanno-Colombiens qui n’ont pas de médecin de famille. Selon le Collège des médecins de famille de la province, 80 % des résidents du district régional de la capitale en ont un, contre 84 % dans l’ensemble de la province.

Selon la société Medimap, les résidents de la province attendent en moyenne 58 minutes dans les cliniques sans rendez-vous, soit plus du double de la moyenne nationale. Victoria a le temps d’attente moyen le plus long du pays, a plus de 2,5 heures.

Une pancarte qui dit que tout le monde mérite un médecin de famille sur le bord d'une rue à Victoria.

Depuis plusieurs semaines, des pancartes « tout le monde mérite un médecin de famille » apparaissent sur les pelouses à Victoria.

Photo : Radio-Canada / Mélinda Trochu

Dans des entrevues menées par Radio-Canada/CBC avec des patients, des docteurs et d’autres, un problème revient régulièrement : le système de rémunération à l’acte. Ce système de la Colombie-Britannique rémunère les médecins pour chaque visite au cabinet.

Les personnes familières avec son fonctionnement disent que le volume élevé de travail administratif nécessaire aux médecins pour obtenir un paiement, combiné au faible montant de salaire net qu’il génère, décourage les médecins de pratiquer la médecine familiale. L’épuisement professionnel les guette également.

Une rémunération à l’acte qui fait débat

La Colombie-Britannique ne nous fournit pas des soins de santé universels, jugeait Camille Currie mardi lors de son passage à l’émission All Points West.

La Dre Jennifer Lush Lush, médecin de famille depuis 20 ans, comprend elle pourquoi certains choisissent de ne pas l’être. La plupart des médecins sont payés environ 30 $ par visite de patient et, à partir de cela, la docteure doit payer le personnel, l’équipement médical et les bureaux.

Elle dit travailler 70 heures par semaine et avoir du mal à concilier travail et vie personnelle. La moitié des heures ne sont pas rémunérées, dit-elle, car elles sont consacrées à de la paperasse.

Un rapport publié dans la revue médicale Le Médecin de famille canadien en novembre 2021 a révélé que les médecins choisissent davantage le travail en milieu hospitalier et la pratique spécialisée plutôt que la médecine familiale, en partie parce qu’ils s’inquiètent des conséquences du modèle de la Colombie-Britannique sur leur équilibre entre le travail et la vie personnelle.

Alicia Pawluk est devenue médecin en 2018 et travaille à l’hôpital en plus de traiter des patients au Cool Aid Community Health Centre à Victoria. Elle dit que dans le système actuel, le revenu net d’un médecin de famille est comparable au salaire minimum.

« Un médecin tout juste diplômé a environ 200 000 $ de dettes. Le salaire minimum ne pourra pas couvrir le type de paiements que nous devons effectuer. »

— Une citation de  Alicia Pawluk, médecin de famille

Une priorité absolue pour Adrian Dix

En mai 2020, le Collège des médecins de famille du Canada a demandé des modèles de financement alternatifs pour remplacer la méthode de rémunération à l’acte afin de recruter et de retenir davantage de médecins de famille.

Le ministre de la Santé, Adrian Dix, assure que mettre les résidents en contact avec un médecin de famille est sa priorité absolue depuis son entrée en fonction en 2017. Pour réduire le fardeau administratif des médecins et aider les personnes qui n’en ont pas, le ministère a investi dans les centres de soins d’urgences et primaires.

Adrian Dix ajoute que la province augmente également l’utilisation de modes de paiement alternatifs pour attirer davantage de médecins de famille.

Mais Joy Williamson, qui est sans médecin depuis huit ans et a été diagnostiquée d’un cancer du sein en 2020, pense qu’elle aurait eu un diagnostic plus tôt si elle avait eu un médecin de famille.

« J’ai reçu des soins trop tard. »

— Une citation de  Joy Williamson, diagnostiquée d’un cancer du sein

La veille de son opération, Joy Williamson craignait avoir une infection du sang et dit avoir conduit dans le Grand Victoria avec son mari et ses deux enfants pendant des heures à la recherche d’un centre de soins qui n’était pas plein. Elle a fini par attendre cinq heures aux urgences pour un diagnostic.

Camille Currie sait à quel point cela peut être frustrant. Elle a créé BC Health Care Matters, un site web où les patients peuvent partager leurs histoires et s’organiser pour demander des changements.

Ces histoires incluent des parents qui ont attendu huit heures aux urgences avec des enfants malades, et un couple de personnes âgées ayant des problèmes de mobilité qui a fait la queue pendant des heures, plusieurs jours de suite, dans un centre de soins d’urgences et primaires qui était constamment plein.

D’après les informations de Bridgette Watson, On The Island, All Points West, Jean Paetkau et La Presse canadienne



Reference-ici.radio-canada.ca

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