Les crabiers du Québec en colère contre Pêches et Océans


Les crabiers du Québec qui fréquentent les zones de pêche du sud du golfe, dont la grande zone 12, prévoyaient partir durant le week-end.

Tout le monde était prêt, aux Îles comme en Gaspésie assurent d’une même voix le président de l’Association des crabiers gaspésiens, Daniel Desbois et Paul Boudreau, représentant des crabiers traditionnels des Îles. Les usines aussi, ajoute le directeur de l’Association québécoise de l’industrie de la pêche (AQIP), Jean-Paul Gagné.

Selon Paul Boudreau, Pêches et Océans leur a fait savoir que la Garde côtière n’était pas prête et qu’il y avait encore de la glace dans le golfe.

Les crabiers et transformateurs du Québec, qui militent pour une ouverture hâtive de la pêche au printemps afin d’éviter les interactions avec la baleine noire, sont indignés.

C’est incompréhensible que ce soit Pêches et Océans qui retardent la pêche au crabe, commente Paul Boudreau. Ils ont tout l’hiver pour se préparer.

« La pêche au crabe est déjà ouverte dans le fleuve [l’estuaire], à l’île d’Anticosti, la pêche à la crevette est ouverte. Ça n’a pas de bon sens que celle au crabe ne soit pas ouverte.  »

— Une citation de  Paul Boudreau, représentant des crabiers traditionnels des Îles-de-la-Madeleine

Le bulletin de glaces sur le site ministère, fait état d’eau libre de glace presque partout dans le golfe.

Des casiers sur un quai

Les crabiers et transformateurs du Québec militent pour une ouverture hâtive de la pêche au printemps afin d’éviter les interactions avec la baleine noire (archives).

Photo : Radio-Canada / Joane Bérubé

Ce qui fâche aussi beaucoup les crabiers, c’est que ces journées de pêche perdues en début de saison sont difficiles à reprendre à la fin lorsque de grands secteurs sont fermés à la pêche en raison de la présence des baleines. Ça peut prendre 10 jours à l’été pour reprendre trois jours perdues au printemps, selon Daniel Desbois.

Un protocole… qui tarde à être appliqué

Les crabiers du Québec demandent depuis plusieurs années de sortir le plus tôt possible au printemps afin que la pêche puisse s’effectuer un maximum de temps possible avant l’arrivée de la baleine noire dans le golfe.

Depuis quelques années, un protocole d’ouverture permet de lancer la pêche sans que tous les ports du golfe soient déglacés.

Des pêcheurs manipulent des casiers de pêche au crabe et du matériel de pêche.

Des pêcheurs de crabe madelinots en plein préparatifs en vue du début de la saison de pêche au crabe (archives).

Photo : Radio-Canada / Luc Manuel Soares

Malgré le protocole, Paul Boudreau rappelle qu’en 2019, les crabiers avaient attendu ceux du Nouveau-Brunswick et n’étaient partis que le 2 mai au détriment des crabiers des Îles qui n’ont pas pu pêcher l’ensemble de leurs quotas.

En 2020, poursuit M. Boudreau, les usines du Nouveau-Brunswick ont retardé l’ouverture parce qu’elles n’étaient pas prêtes à cause de la COVID-19 même si toutes les usines du Québec étaient prêtes. Les pêcheurs des Îles ont laissé 105 tonnes de crabe à l’eau.

L’an dernier, l’hiver exceptionnellement doux a favorisé un départ au début d’avril et la question des glaces ne s’était pas posée.

Cette année, la glace est particulièrement présente dans les ports du Nouveau-Brunswick, notamment à Caraquet.

Et là, la Garde côtière qui n’est pas prête! Ça n’a aucun bon sens, lance Paul Boudreau. Il craint que les scénarios de 2019 et 2020 se répètent.

Pêches et Océans annule une réunion

Président du comité de l’industrie qui devait se rencontrer vendredi, M. Desbois ne comprend pas non plus pourquoi c’est le ministère qui a annulé la rencontre de l’industrie, prévue vendredi. Ils sont, dit-il, en support technique pour la traduction, des choses comme ça et d’apporter la Garde côtière pour les mises à jour, Environnement Canada.

Il explique que si lors de ces rencontres, les membres de l’industrie s’entendent sur une date de départ, Pêches et Océans publient l’ordonnance dans les 48 heures suivantes.

Il a été avisé comme les autres d’une annulation qu’il qualifie d’arbitraire.

Paul Boudreau partage la même incompréhension : c’est Pêches et Océans qui annule la réunion de l’industrie!

Sous l’oeil des Américains

L’Association québécoise de l’industrie de la pêche joint sa voix à celles des crabiers. Les transformateurs aussi sont prêts. Ils demandent à la ministre des Pêches, Joyce Murray, une ouverture immédiate de la pêche.

Le directeur de l’Association québécoise de l’industrie de la pêche, Jean-Paul Gagné ajoute avoir écrit pas plus tard que la semaine dernière à la ministre Murray, pour lui demander d’autoriser la pêche dès que le golfe serait libre de glace, ce qui est maintenant le cas, dit-il. Et là on attend!

Il ajoute que les transformateurs du Québec se sont même engagés à ne pas acheter du crabe des pêcheurs du Nouveau-Brunswick pour ne pas nuire aux entreprises de la province voisine.

Des travailleurs d'une usine de transformation de fruits de mer.

Des travailleurs d’une usine de transformation de fruits de mer (archives).

Photo : Radio-Canada

M. Gagné observe lui-aussi que la meilleure protection de la baleine contre les empêtrements est une pêche hâtive. Les transformateurs sont aux aguets puisque des interactions avec la baleine noire pourraient mettre en danger la commercialisation de la ressource aux États-Unis.

Jean-Paul Gagné fait valoir que c’est cette année, que les Américains vont décider si les mesures de protection du Canada envers les mammifères marins sont adéquates : Ils nous surveillent de près!

Une mauvaise évaluation entraînerait la fermeture de la frontière aux exportations de produits marins en provenance du Canada. Ce serait désastreux pour l’économie des régions côtières, commente M. Gagné. Pêches et Océans sait tout ça, ajoute-t-il. Ils ne semblent pas nous écouter au Québec.

Une question politique?

La déconvenue des crabiers a suscité l’intervention du député des Îles-de-la-Madeleine, Joël Arseneau, qui lui aussi demande au fédéral de lancer au plus tôt la pêche. Il souligne que cette pêche fait vivre 830 travailleurs et travailleuses au Québec.

Plus tôt en mars, le ministre des Pêcheries, André Lamontagne, avait écrit à la ministre pour lui faire part de ses préoccupations concernant la date de départ de la pêche.

Le représentant des crabiers traditionnels des Îles-de-la-Madeleine considère qu’au final, c’est la ministre des Pêches, Joyce Murray, qui est directement responsable du manque de préparation de son ministère. C’est elle aussi, selon lui, qui sera aussi responsable s’il y a des empêtrements.

Interpellé, le ministère des Pêches et des Océans a promis une réponse qui n’était pas encore venue au moment de la publication.



Reference-ici.radio-canada.ca

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