La STM rend hommage à l’un de ses premiers chauffeurs de bus noirs


Né à Pilate, en Haïti, en 1935, l’homme a d’abord immigré aux États-Unis, où il a été chauffeur de taxi puis réceptionniste à l’Organisation des Nations unies, à New York, avant de déménager à Montréal en 1969.

Il a d’abord travaillé comme conducteur d’autobus scolaires dans la métropole québécoise, avant d’être embauché par la CTCUM (devenue par la suite la Société de transport de Montréal – STM) en 1973, et assigné à la ligne de bus 161, qui va du métro Rosemont à Côte-Saint-Luc.

Ses filles, Rachel Guénin et Bernadette Jean, se souviennent avec bonheur des moments passés dans le bus avec leur père, qui les amenait en balade et les laissait au centre commercial du boulevard Cavendish, pour les reprendre à la fin de sa route.

Il nous montrait comment fonctionnait le bus, a raconté Bernadette Jean à CBC. Je savais comment ouvrir la porte et faire démarrer l’autobus.

C’était vraiment spécial. En grandissant, c’est quelque chose que l’on savait : le fait qu’il était l’un des premiers chauffeurs de bus noirs. Cela nous apportait beaucoup de fierté.

La STM a souligné son travail à l’époque des Jeux olympiques d’été de 1976 à Montréal, où il a transporté des athlètes de partout dans le monde.

Jean-Baptiste Jean a été employé du service de transport en commun jusqu’en 1982, où il a été forcé à un arrêt de travail à la suite d’une crise cardiaque. Il est décédé en 1987.

Confronté au racisme

Si sa famille se réjouit de l’hommage qu’on lui fait, elle se remémore aussi les difficultés et les insultes racistes qu’a dû endurer Jean-Baptiste Jean à une époque où l’on se souciait peu de la diversité.

Il y avait de la surprise [de la part de la clientèle] de voir un chauffeur de bus noir, a expliqué sa femme, Nicole Vigne Jean. Certaines personnes étaient méchantes. Elles lançaient des insultes.

La femme est assise dans un sofa.

Nicole Vigne Jean, la femme de Jean-Baptiste Jean

Photo : CBC / Kwabena Oduro

Malgré ces comportements déplorables qui le frustraient, il était fier de son travail et restait courtois avec les usagers et usagères.

C’était un homme adorable, il était gentil avec tout le monde, a souligné sa femme. Il a probablement marqué plusieurs clients et clientes, parce qu’il était très amical et extraverti, a ajouté sa fille, Bernadette Jean.

L’ouverture au monde d’Expo 67, et le lent changement des mentalités

Avant les années 1980, le service de transport public ne s’intéressait pas aux questions de diversité en son sein, selon l’historien Benoît Clairoux, qui travaille pour la société de transport. Il y avait des personnes racisées au sein de son personnel, mais l’origine ethnique des personnes qui y travaillaient n’était pas mentionnée dans les archives de l’organisation.

L’historien croit qu’Expo 67, avec ses millions de visiteurs et visiteuses provenant des quatre coins du monde, a joué un rôle important dans l’ouverture au monde de la population québécoise, et pourrait avoir joué un rôle dans le changement graduel des pratiques d’embauche dans les transports publics.

Il a été heureux de voir les photos que la famille avait précieusement conservées de Jean-Baptiste Jean dans son uniforme de la CTCUM, et même le manteau bleu poudre qu’il portait au travail.

C’était le même uniforme, été ou hiver, a expliqué Benoît Clairoux. Il y avait une époque où il fallait le porter tous les jours, qu’il fasse 30 degrés Celsius au-dessus ou en dessous de 0. C’était comme l’armée : vous aviez votre matricule, et il fallait cirer vos souliers.

À travers ces photos, vous pouvez voir la fierté qu’il avait d’être chauffeur de bus à Montréal, selon Benoît Clairoux.

La femme se tient debout devant un mur où est accrochée une peinture.

Nicole Antoine, petite-fille de Jean-Baptiste Jean

Photo : CBC / Kwabena Oduro

Aujourd’hui, les personnes issues de minorités visibles, ethniques ou de communautés autochtones forment plus d’un tiers du personnel de la STM. La petite-fille de Jean-Baptiste Jean, Nicole Antoine, se réjouit du fait que son aïeul ait pu ouvrir la voie à d’autres.

Ça ne remonte pas à si loin, le premier chauffeur de bus noir, a-t-elle rappelé. J’espère que dans le futur, mes filles n’auront pas à se soucier d’être les premières à faire quoi que ce soit.

Avec les informations de Kwabena Oduro et Verity Stevenson, CBC



Reference-ici.radio-canada.ca

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