Cancer et pesticides : une décision d’un tribunal suscite l’espoir



À l’âge de 34 ans, Solange Masson a combattu un lymphome non hodgkinien. Elle suspecte que ce cancer ait été causé par une exposition prolongée aux pesticides et aux herbicides à la ferme familiale. Évidemment, quand j’étais petite, je jouais dans le champ. C’étaient des champs de maïs et le Roundup est utilisé avant la culture du maïs, donc je me dis que c’est sûr que j’en ai respiré, soutient-elle. Cette dernière se réjouit que le Tribunal administratif du travail ait récemment reconnu le lien de causalité entre le cancer et les pesticides. Ce jugement conclut que le lymphome non hodgkinien d’un ouvrier agricole de Montérégie, Armando Lazo Bautista, est attribuable aux pesticides.

« Je pense que c’est la première fois que l’on reconnaît au Québec l’exposition aux pesticides comme cause d’un cancer. »

— Une citation de  Maryse Bouchard, professeure agrégée au Département de santé environnementale et santé au travail de l’Université de Montréal

Mme Bouchard juge que la décision du tribunal démontre que même des substances approuvées par le gouvernement peuvent être nocives. Si le gouvernement se fie uniquement aux données de l’industrie, on n’a pas un portrait juste du vrai risque de ces molécules-là, mentionne la professeure.

« Toutes les décisions sont prises en fonction de données fournies par les vendeurs. Comme on l’avait vu dans l’affaire Louis Robert, ce sont non seulement des données qui sont utilisées pour l’approbation et la vente générées par les industries qui les produisent, puis la prescription de la vente individuelle aux agriculteurs est également gérée par cette même industrie. »

— Une citation de  Romain Rigal, administrateur chez Victimes de pesticides du Québec (VPQ)

Le président de l’Union des producteurs agricoles de l’Estrie espère que le gouvernement ajoutera le lymphome non hodgkinien à la liste des maladies professionnelles reconnues par l’État. Le cabinet du ministre du Travail a confirmé à Radio-Canada qu’un comité scientifique évaluera la question, sans toutefois s’avancer sur un échéancier.

« Oui, on peut mettre un comité scientifique en place, mais les recherches ont déjà été faites dans d’autres pays. C’est juste de ramasser cela, de l’étudier et par la suite, je pense que cela peut être un travail qui peut se faire assez rapidement, mais des fois on dirait qu’on étire le temps.  »

— Une citation de  Michel Brien, président de l’UPA en Estrie.

Cette reconnaissance permettrait notamment aux travailleurs d’être indemnisés par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).

Selon M. Brien, elle permettrait aussi de poursuivre la sensibilisation du public. Comme on vient de voir là, comme on entend là, il y a une sensibilisation auprès des producteurs concernant toutes les précautions à prendre dans l’usage des pesticides , soutient le président de l’Union des producteurs agricoles en Estrie.

Solange Masson ne se fait toutefois pas d’illusions sur les suites qui seront données au dossier. Je ne m’attends pas à ce que cela se règle dans les prochaines années. D’après moi, ça va être long , admet Mme Masson.

Dans une réponse écrite à Radio-Canada, l’entreprise Bayer, qui commercialise entre autres le Roundup, affirme que son produit est sans danger si l’utilisateur respecte les directives d’utilisation. Alors que nous avons beaucoup de compassion pour quiconque devant vivre avec des problèmes de santé, incluant un lymphome non hodgkinien, nous avons confiance que nos produits contenant du glyphosate ne sont pas la cause de leur maladie*, souligne-t-elle.

D’après le reportage de Thomas Deshaies

*Traduction de Radio-Canada



Reference-ici.radio-canada.ca

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